Cinquième chapitre du roman de science-fiction « Les Hortours » .
Dans ce chapitre, vous verrez comment Vaaxor découvre la Tour, et comment Samra compte renverser le Dictateur pour s’y substituer.
Si vous n’avez pas encore lu les chapitres précédents, voici le lien vers le début et la présentation de ce roman, cliquez sur « Les Hortours, chapitre 1 » .
Titre de ce chapitre 5 : Les fauves.
Genre : roman de science-fiction.
Auteur : Patrick Huet.
Texte à lire gratuitement, mais soumis au copyright de Patrick Huet.
Plan de cette page.
1- Note d’explication.
2- A lire gratuitement, pas à reproduire.
3- Résumé des épisodes précédents.
4- Début de la lecture – Pour le chapitre 5.
5- Où acheter ce livre ? Pour ceux qui le souhaitent.
Ceux intéressés par le livre papier peuvent se procurer ce roman par le lien suivant : « roman de science-fiction » (lien à cliquer).
6- Autres livres à lire.
1- Note d’explication.
Dans le but de partage avec ses lecteurs de nouveaux écrits, Patrick Huet a voulu proposer plusieurs de ses romans en lecture libre.
Le roman « Les Hortours » (publié en tant que livre papier) est donc aussi diffusé ici par chapitre sur notre site.
2- A lire gratuitement, pas à reproduire.
Important. Ce chapitre est publié ici pour votre agrément. Sa lecture est libre, mais pas sa reproduction.
Tout le texte est soumis au copyright de Patrick Huet. Si vous souhaitez en reproduire des passages, nous vous remercions de contacter l’auteur pour en obtenir l’autorisation.
Exception pour les enseignants. Patrick Huet autorise ces derniers à utiliser ou reproduire ce chapitre auprès de leurs élèves, à condition que ce soit uniquement dans le cadre de la classe et bien sûr gratuitement.
3- Résumé des épisodes précédents.
Vaaxor, dernier rescapé d’une tribu décimée par les fauves, avait rencontré en rêve Lahiline, une jeune fille vivant au sommet d’une tour immense. Depuis son réveil, il s’est lancé à sa recherche.
Lahiline appartient au clan des Hortours, ceux ayant refusé l’autorité d’une dictature ayant pris la direction de cette tour aux 200 000 résidents. Une structure en forme de cône tronqué, de 5 km de haut possédant au sommet une terrasse de 10 km². Là se sont réfugiés les Hortours oubliés depuis longtemps par la milice.
La découverte du cadavre d’un Hortours vidé de son sang pat une chauve-souris vampire réveille la haine du dictateur (Elarac) qui promet une récompense à qui ramènera un Hortours vivant.
Elarac, ancien chef de la Garde noire devait diriger la prise de contrôle de la Tour au profit de la Guilde des savants. Au lieu de cela, il prit leur place, élimina la plupart d’entre eux, ne conservant que ceux utiles au fonctionnement de la tour ainsi que Samra (l’ancien chef de la Guilde), le seul à connaître le secret de fabrication de l’élixir de longue vie qui permet au dictateur, aux savants et aux gardes de vivre depuis 900 ans. Le reste de la population vit dans l’inertie sous l’effet d’une drogue de soumission.
Samra prépare en sous-main le renversement d’Elarac.
Côté Vaaxor.
Tout entier à sa quête, il se hâte en direction de cette Tour aperçue en rêve. Il ignore que le Zac (un énorme fauve qui n’abandonne jamais sa proie) auquel il avait échappé avait de nouveau repéré son odeur et s’était relancé à sa poursuite.
Le zac le rejoint juste à l’instant où, ayant touché la Tour, il faisait face à l’assaut de deux gardes cherchant à le capturer vivant pour en toucher la récompense.
Les gardes se retournent vers le zac. Dans le tourbillon du combat, Vaaxor réussit à s’introduire dans la Tour, suivi peu après par le zac.
4- Début de la lecture. Ici commence le chapitre 5.
(Texte soumis à copyright. Ne peut être reproduit qu’avec l’accord de l’auteur.)
Titre du chapitre : Les fauves.
– Un quoi ?
– Un fauve, Excellence ! Selon les sentinelles, la bête est arrivée avec l’homme.
– Un sauvage s’approche de la Tour avec un fauve et, non seulement, on lui ouvre la grille électrifiée, mais aussi la porte d’entrée. Qu’est-ce donc que ces sornettes ? Amène-moi ces hommes, Zortac ! Je veux les interroger moi-même.
Cinq minutes plus tard, encadrés par six de leurs collègues, les deux malheureux soldats, le visage terrifié, s’avançaient mécaniquement. La voix tremblotante, le plus petit des deux répondit aux questions brutales du Dictor.
– Nous… nous sommes fait piéger, Excellence. Cet homme mince nous paraissait sans danger. Alors, nous avons coupé l’électricité de la grille puis nous l’avons ouverte à distance pour le laisser entrer dans l’enceinte protégée.
– Et le fauve qui l’accompagnait, gronda Zortac, il ne paraissait pas dangereux, peut-être ?
La sentinelle se tortilla.
– C’est qu’il n’y avait pas de fauve avec lui quand il a passé la grille. Il était seul. Nous avons voulu le capturer vivant avec un filet pour que vous puissiez le questionner à votre guise. Nous sommes sortis. Subitement, il s’est jeté sur nous avec sa hache. Juste au moment où nous allions le neutraliser, le fauve est apparu. C’est alors que nous avons appelé du renfort, car nous ne pouvions repousser le Xac ni l’abattre. Le sauvage en a profité pour entrer dans la Tour. Le fauve a pu échapper à nos lames. Il a suivi son maître et s’est engagé lui aussi dans la Tour.
La voix de Zortac tonna sur la nuque inclinée des deux soldats.
– Votre comportement est inadmissible. La mission des sentinelles est de veiller à la sécurité de la Tour et d’en interdire l’entrée à quiconque, qu’il soit homme ou animal ! Désormais, vous ne serez affectés qu’aux tâches subalternes de la Garde Noire !
– Non ! rugit Élarac. Avoir favorisé une telle intrusion confine à la trahison et mérite une sanction plus coriace.
Il s’adressa aux gardes noirs cernant les deux sentinelles.
– Conduisez-les à l’infirmerie et donnez-leur de la drogue d’esclavage ! Je veux les voir ramper dans leur condition d’esclave. (Il se tourna vers les prisonniers.) Quand l’intrus et son fauve seront capturés, je vous promets un châtiment à la hauteur de votre faute !
Et dans les yeux d’Élarac passa une lueur qui les fit blêmir d’épouvante. Lorsque la pièce fut vide, le Dictor s’adressa à Zortac.
– Il nous faut cet intrus vivant. Nous devons l’interroger. Quelles dispositions as-tu prises ?
– L’alerte générale, Excellence ! Toute la Garde est informée de cette intrusion. J’ai concentré nos forces sur les cinq premiers niveaux, par précaution uniquement, car le sauvage ne peut pas connaître le fonctionnement de nos ascenseurs antigravitiques. À l’heure qu’il est, il doit se trouver au rez-de-chaussée, c’est-à-dire au premier niveau, en train de courir d’un couloir à l’autre ou d’une pièce à une autre. Nous l’aurons très rapidement, je vous l’assure. En cet instant même, les gardes se rassemblent pour organiser la fouille systématique du secteur en question. Je leur ai ordonné de le capturer vivant.
Au premier niveau, justement, Vaaxor avait observé, deux fois encore, des gardes noirs entrer dans le creux cerné de rouge, pousser les carrés lumineux puis s’envoler dans les airs. Bien qu’ayant grandi dans la jungle et ne connaissant rien des tours, il devina cependant que les gardes montaient à un échelon supérieur. Si eux pouvaient le faire, alors lui aussi en serait capable !
D’autant que les hommes en noir arpentaient les alentours en plus grand nombre. Instinctivement, il sentit qu’ils se regroupaient avant d’entreprendre une chasse minutieuse. Il se ferait bientôt prendre s’il restait ici !
Il s’approcha de la cavité rouge et y passa la tête. Rien en haut ni en bas hormis un long tube interminable. Méfiant, il avança un pied dans le tube. Ce fut comme s’il marchait sur une dalle invisible. Les mains accrochées au bord de l’ouverture, il posa le deuxième pied à l’intérieur. La dalle tenait toujours. Il ne tombait pas.
Le Xac feulait sourdement. Depuis qu’il avait pénétré dans la Tour, il avait suivi l’odeur de sa proie jusqu’à un panneau vert. L’odeur s’arrêtait là, brusquement. Il avait bien attaqué le panneau, mais ce dernier avait résisté. Des hommes en noir avaient surgi. L’un deux avait tiré un éclair de feu qui lui avait frôlé l’épaule. Le Xac s’était débarrassé de son agresseur d’un coup de patte et s’était enfui plus loin.
Depuis, il errait de couloir en couloir, déchaînant la panique lorsqu’il croisait sur son chemin un groupe de ces hommes en noir. Il lui suffisait de s’élancer sur eux pour que la horde s’éparpillât dans des petites pièces, derrière des panneaux verts.
Ce fut après l’un de ces assauts qu’il retrouva l’odeur de sa proie. Il la suivit un moment puis aperçut, à l’extrémité d’un corridor, l’objet de ses attentions gesticuler dans un trou. Un grondement explosa une nouvelle fois de sa gorge comme il se précipitait en avant.
Vaaxor avait lui aussi aperçu le fauve. Il paraissait encore plus enragé que dans la jungle. Sous l’éclairage opale des couloirs, la puissance de la bête ressortait d’autant plus vivement que l’espace en était réduit. Sa hache ne pourrait stopper une machine de guerre aussi déterminée.
Ses doigts nerveux poussaient au hasard les carrés lumineux, mais rien ne se passait, pas de lueurs qui l’emportaient. Le Xac, lui, s’approchait… furieusement vite.
Vaaxor frappa d’un coup poing l’ensemble du clavier. Ce faisant, il appuya également sur le carré jaune en bas, à droite, celui qui déclenchait le mécanisme d’ascension. Une lumière irisée inonda ses épaules et, brusquement, il s’envola, les griffes du fauve à moins de cinquante centimètres de l’entrée.
Emporté par son élan, le Xac s’écrasa contre la paroi interne du tube ascensionnel. À demi assommé, il roula sur lui-même en feulant. L’épaisseur de son ossature et de sa musculature était telle que, malgré la violence du choc, il ne se brisa aucun os. Il marchait au-dessus du vide sans pour autant s’en étonner, la fente jaune de ses yeux scrutant les hauteurs. Ses griffes dérapaient sur la paroi. Il abandonna ses tentatives d’escalade et se glissa hors du tube et se mit en quête d’une voie lui permettant de s’élever.
Le hasard guida ses pas vers un panneau bleu entrebâillé. Il se faufila dans l’étroite ouverture et découvrit un escalier à peine plus large que lui qu’il grimpa aussitôt. Il bondit sur un palier obstrué par un panneau semblable à celui au bas de l’escalier. Un féroce coup de griffe le fit voler en éclat.
L’intelligence de chasseur des Xac et leur sens de l’orientation surpassaient les capacités des fauves de moindre envergure.
Au deuxième niveau, identique en tout point au premier, le Xac effectua le trajet inverse à celui qu’il venait de parcourir l’étage au-dessous. Il s’arrêta devant le cadre rouge annonçant l’entrée du tube, renifla le sol. Des odeurs innombrables lui parvenaient sauf celle de sa proie. Alors, il rebroussa chemin, repassa la porte et monta de nouveau.
Les prunelles fendues de ses yeux brillaient d’un éclat sauvage et d’une détermination farouche.
Une patrouille de gardes noirs se figea bientôt devant la porte bleue brisée. Le chef du groupe saisit sa visionneuse et alerta le Quartier Général. Zortac sauta immédiatement dans un ascenseur. Peu après, il examinait la porte.
– Fracassée ! Remarquez les griffures qui sillonnent le panneau. C’est le fauve qui en est l’auteur. Les portes des escaliers de secours sont moulées dans un matériau léger. En cas de sinistre, si jamais elles étaient verrouillées, les habitants pourraient les casser d’une simple pression et évacuer la zone concernée. C’est une mesure de sécurité mise au point à l’origine par les concepteurs de la Tour.
– Le fauve cherche-t-il à rejoindre son maître, Zortac ? Ou bien était-il avec lui quand il s’en est pris à ce battant ?
– Je l’ignore. Ce qui est certain désormais, c’est que les escaliers de secours ont été découverts. Cela signifie que l’intrus ou le fauve ou les deux ensembles ont eu le loisir d’accéder à des niveaux supérieurs. Qui sait à quelle hauteur ils se trouvent maintenant ? Nous allons réorganiser nos patrouilles en fonction de ce dernier événement.
– Nous ne pouvons pas fouiller les deux mille étages en même temps.
– Ce ne sera pas nécessaire. Ils sont à pied et à grimper, ils se fatigueront très vite. Concentrons-nous pour le moment sur les niveaux inférieurs. Là où les panneaux sont brisés.
Tandis que Zortac parlait ainsi, le Xac arrivait au vingtième niveau. Peu après, il respira l’odeur qu’il recherchait. Il se précipita sur sa piste, mais là encore, l’odeur s’arrêtait à une plaque verte sur laquelle ses griffes dérapaient.
Il retroussa les babines et sillonna les couloirs, la truffe au ras du sol.
Au même niveau, bien qu’à une longue distance de là, Vaaxor errait lui aussi au gré des embranchements qu’il franchissait.
L’ascenseur avait stoppé subitement sans bruit ni lumière. Désorienté, il s’était élancé dans un couloir, avait traversé une pièce, une deuxième, avait repris un corridor et s’était enfoncé encore plus avant dans le cœur de la Tour. Il nageait dans la confusion, ne se souvenait plus de la raison de sa présence ici. L’attaque des sentinelles, celle des gardes noirs, cette voix qui avait hurlé sa description dans le couloir du bas et qui avait donné l’ordre de l’intercepter, tout cela le déroutait.
Il se demandait ce qu’il était venu faire là, dans cette fourmilière agressive. Incapable de répondre à ces questions, il ne lui restait d’autres choix que de continuer sa progression pour échapper à ses poursuivants.
**
La voix d’un garde noir résonna dans une visionneuse.
– Ici numéro 25-15. La porte de la sortie de secours au vingtième niveau est brisée, celle du vingt-et-unième en revanche est intacte.
– Ici Zortac, message reçu. Le fauve se trouve donc au vingtième. Que les patrouilles 30 à 50 ratissent le secteur immédiatement ! Si vous dénichez l’homme sauvage, ne le tuez pas. S’il résiste, assommez-le du plat de votre sabre.
L’information s’était diffusée uniquement sur le canal restreint des visionneuses de la Garde Noire. Les haut-parleurs s’étaient tus depuis longtemps et Vaaxor marchait, content de ne plus entendre cette voix parler toute seule dans les couloirs alors qu’aucune bouche ne prononçait ces paroles.
Il ouvrit une porte plus large que les précédentes et se retrouva soudain dans une salle immense, haute de quinze mètres. Sa longueur à vue d’œil : dans les deux cents mètres. Elle était si vaste et si vivement éclairée qu’il pensa être sorti de la Tour. Il se ravisa en voyant les globes lumineux suspendus à intervalles réguliers. Son esprit eut dû mal à admettre qu’il ne regardait pas une hallucination, mais bien une prairie à l’intérieur de la Tour.
Ou plutôt un champ couvert de plantes aussi hautes que lui, certaines même le dépassant. Le sol n’était pas de cette matière unie qu’il avait foulée partout jusque-là. Ses pas s’imprimaient dans une terre riche et grasse. D’étroites allées parcouraient le champ. Une dizaine de personnes en tunique grise et la mine pensive arrosait la terre autour des tiges charnues, d’autres rassemblaient des épis dans de grands paniers. Rivés à leurs travaux, ils ne levèrent pas la tête et n’esquissèrent aucun geste à son arrivée.
Peut-être que s’il leur parlait, ils pourraient intervenir auprès du chef de ces lieux et mettre un terme à la traque dont il était l’objet.
– Hé ? L’homme ? appela-t-il d’une voix qui se voulait chaleureuse. Bonjour à toi. Mon nom est Vaaxor. Je viens de l’extérieur. Je suis un ami.
L’homme le regarda béatement. Ses yeux se posaient sur lui sans aucune émotion. Il retourna à sa tâche sans plus s’intéresser à l’inconnu vêtu de peaux. Vaaxor, perplexe, avança dans l’allée. Une femme aux longs cheveux bruns cueillait les épis jaunes d’une plante. Quelque chose dans le balancement de cette chevelure éveilla en lui un souvenir lointain empreint de soleil.
Un piétinement rageur monta dans son dos. Un éclair métallique brilla au coin de son œil. Instinctivement, il baissa la tête. La lame d’un sabre étincela au-dessus de lui. Ses réflexes, affûtés par des années de vie sauvage, lui firent projeter son pied dans le ventre du garde noir. Dans le même temps, il brandit sa hache de pierre.
Son agresseur se tordait par terre, mais derrière venait une dizaine d’autres.
Les gardes noirs, sabre en main, s’élancèrent sur lui. Il détourna une première lame, une deuxième, puis commença à reculer sous l’assaut. D’un mouvement brusque, il sauta sur le côté et assomma l’un des assaillants. En tombant sur ses collègues, le soldat désorganisa le cercle d’attaque. Vaaxor en profita pour fuir dans une allée.
L’un des hommes saisit une arme courte et la leva sur Vaaxor.
– Chef, avertit un autre, Zortac nous a ordonné de le prendre vivant.
Un rictus déforma le visage rude du garde noir.
– Vivant, oui ; pas forcément, en entier ! Je vais lui griller une jambe et après cela, nous le cueillerons sans problème.
Un trait de feu jaillit du laser. À l’instant même, Vaaxor eut l’idée de sauter au milieu des hautes plantes où il sèmerait plus facilement ses agresseurs. Le trait de lumière le frôla et se noya dans la masse végétale. Une flamme vive bondit à l’endroit de l’impact et se propagea de tige en tige. Un deuxième trait fusa du laser, un troisième. Dans sa colère, le chef de l’escouade tirait au hasard, là où il pensait que le fugitif évoluait. Son laser s’enraya soudain.
Un rugissement sauvage éclata près de l’entrée, grande ouverte.
Les gardes noirs eurent alors mieux à faire qu’à pourchasser un simple sauvage. Les sabres s’élevèrent en rempart contre le Xac furieux de cet obstacle, furieux de ce feu qui mugissait de tous les côtés du champ. Vaaxor entendait ses rugissements et les cris épouvantés des gardes. Ses yeux voyaient à peine à travers le nuage de fumée noire qui l’étouffait. Il buta contre la cloison opposée, la longea à tâtons jusqu’au moment où sa main heurta la poignée d’une porte. Il en ouvrit le battant, le referma derrière lui et courut du plus vite qu’il le pouvait.
La voix mystérieuse sans bouche ni tête résonnait de nouveau dans les couloirs.
« Incendie niveau 20, secteur 8. Évacuation immédiate ! Alerte bleue ! »
Vaaxor courait toujours. Parfois, il se réfugiait de justesse dans une pièce. Des hommes caparaçonnés de rouge et portant un étrange appareil sur le dos passaient en trombe. Dès lors, il évita de suivre les couloirs, préférant traverser les pièces de part en part quand elles disposaient de plusieurs ouvertures.
Il arriva près de la bouche d’un tube, à l’encadrement vert cette fois. Il s’y engagea. La position horizontale du tube l’étonna, mais ses doigts pianotaient déjà plusieurs touches. Il prit le temps d’observer ce qui se passait. La lumière irisée envahit son espace lorsqu’il pressa le carré jaune en bas à droite du clavier. Il comprit alors le fonctionnement de ces tunnels. Une lueur de satisfaction éclaira son regard ébloui par cette force antigravitique qui l’entraînait loin du secteur 8.
Le trajet s’arrêta comme la fois précédente, subitement et sans qu’il en fût affecté. Il erra un moment puis poussa un cri de joie. Une ouverture, cernée de rouge ! Un de ces tubes qui montaient.
Au milieu du brouhaha, du crépitement de l’incendie et des hurlements des gardes, le Xac feulait de rage. Un coup de patte fit voltiger une des lames, mais deux autres s’abattirent et lui taillèrent le cuir. Ses blessures, légères, avivèrent sa fureur. Les sabres se hérissaient telle une haie mortelle. Et au sein de leurs porteurs, aucun qui ne fut sa proie !
Il les abandonna pour remonter l’odeur qu’il pistait.
Des hommes et des femmes se précipitèrent vers la sortie. Il ne s’en soucia pas. Seule comptait la vibration de ce fumet. Soudain, les effluves disparurent dans l’avalanche de fumée, il se retourna. Le dernier des hommes en noir venait de fermer la porte d’entrée, coupant toute possibilité de sortie. Il en rechercha une autre, en longeant la cloison.
Les cendres lui brûlaient les narines. Au fil de sa fuite, il donna des coups de griffes enragés à la cloison. Un lambeau de mur éclata sous sa patte. Un filet d’air siffla au travers de la fêlure. Il redoubla ses coups. L’ouverture dévoilait un tube un peu plus large que son corps. Il s’y introduisit. Ses griffes se plantèrent dans la matière du conduit et il s’éleva d’un mètre.
Entraînée par l’appel d’air, la fumée s’engouffra dans le conduit d’aération. Pour ne pas mourir étouffé, le Xac se hissa d’un nouveau mètre, puis d’un autre. Les deux paires de griffes se plantaient férocement dans la paroi et, toujours poussé par la brûlure de la fumée, le fauve continua son ascension. La croisée d’un boyau transversal lui offrit un parcours horizontal plus conforme à sa nature. Il s’y engagea. Un peu plus tard, il en toucha l’extrémité fermée par une grille. Il voulut rebrousser chemin quand le fond métallique sous son corps se souleva subitement.
Il se trouvait dans un monte-charge automatique qui se déclenchait dès qu’un poids reposait sur la plaque. Sa vitesse en était prodigieuse.
Il feula de colère mais ne bougea pas, son instinct lui dictant de se ramasser bien à l’écart des parois qui défilaient de chaque côté. Le monte-charge finit par s’immobiliser. Il dut se tailler un chemin dans l’un des conduits horizontaux devant lui. Des odeurs de cadavre taquinaient ses narines par intermittence.
T
Une voix rauque, coléreuse, hurla dans une visionneuse.
– Zortac ! Par le sang des damnés, que se passe-t-il ?
– Excellence, nous avons un problème au vingtième niveau.
– Un problème ? Tu appelles l’incendie de la serre numéro 5 un problème ?! Comment se fait-il que vous vous soyez battus à une telle hauteur alors qu’il aurait dû se trouver au rez-de-chaussée ? Je croyais que ce sauvage ignorait le fonctionnement des tubes ascensionnels ?
– Apparemment, il a découvert les escaliers de secours.
– Et l’incendie ?
– Un des chefs d’escouade a utilisé son laser en dépit des ordres de capturer l’intrus vivant, Excellence. Il sera puni, soyez-en certain.
– J’y compte bien, Zortac. Et par tous les démons, amenez-moi cet homme ! Ce n’est qu’un humain, un sauvage. Ne me dites pas que la Garde Noire est incapable de mettre la main sur sa peau de bête. Faut-il que j’envoie les troupes d’élite à sa poursuite ?
– Les soldats de base suffiront, Excellence.
– Alors, du nerf ! Et rappelle-toi, je le veux vivant. Je veux savoir d’où il vient et ce qu’il est venu faire dans la Tour.
Les visionneuses s’éteignirent.
Une troisième oreille avait assisté, clandestinement, à la conversation. Samra, assis sur un divan face à un gros appareil, hocha la tête d’un air satisfait.
– Très intéressante, cette petite conversation ! Élarac, tu m’as emprisonné dans ce secteur, mais tu ne peux empêcher mes mains d’agir librement dans mes appartements. On devrait toujours se méfier d’un savant, il tire parti de tous les éléments à sa disposition. Ainsi ai-je eu la bonne idée de confectionner cet ordinateur. Grâce à lui, je peux écouter l’ensemble des conversations qui se déroulent dans les visionneuses de la Garde Noire. Que ce soit celles des soldats, celle d’Élarac ou de Zortac, mes deux plus chers ennemis.
Il se leva et arpenta sa salle de travail.
– On doit pouvoir tirer un avantage de cette intrusion. Sortons y réfléchir. Qui sait, en marchant, aurai-je peut-être une idée lumineuse.
Un autre qui s’interrogeait sur ses actions dans les minutes à venir, c’était Vaaxor. Il avait appuyé sur plusieurs touches puis sur le carré jaune. Le tube l’emportait loin, très loin, car il voyait de nombreuses ouvertures défiler rapidement devant ses yeux. Il n’essaya pas de les compter. Lorsqu’enfin il s’immobilisa, il devina qu’il se trouvait à un niveau extrêmement élevé.
Il sortit à pas de loup.
Aucun bruit de voix ni de tumultes. La poursuite n’avait pas gagné cet étage.
Ici, au lieu de l’éternel revêtement gris, un tapis vert, épais couvrait le sol. Il vogua à droite, à gauche, marcha un bon moment et s’arrêta face à une porte différente des autres. Une gravure incrustait ses couleurs noir et argent dans le panneau, les couleurs si caractéristiques qu’arboraient ses poursuivants. Par un pur réflexe de curiosité, il poussa la porte mais n’entra pas.
Il lança un regard méfiant dans la grande pièce spacieuse. Un mouvement accrocha le coin de sa rétine. Il tourna la tête instinctivement. Un homme vêtu d’une longue blouse blanche avait surgi d’une allée perpendiculaire, à cinquante mètres de là. L’individu émit un petit cri et saisit quelque chose à sa ceinture. Une arme ?
Vaaxor n’attendit pas la réponse. Il bondit en arrière et se coula dans un corridor à sa gauche. Ensuite, il s’évertua à inscrire le maximum de distance entre lui et cet étrange personnage.
Dans le couloir précédent, l’homme en blouse blanche n’avait pas bougé. Il parlait vivement dans sa visionneuse.
– Ici Samra, niveau 1502 – secteur 25. L’intrus est là ! Il vient d’emprunter le couloir 68.
L’alerte se propagea de part en part. Une dizaine d’escadrons reçut l’ordre de fouiller tout l’étage.
Un sourire glacial étirait la face émaciée du scientifique.
– Voilà ce qu’il me fallait ! Bientôt, l’un de mes ennemis ira visiter l’autre monde.
Il étreignit sa visionneuse et composa un numéro à manipuler avec une prudence infinie. Une voix rauque lui répondit.
– Ici Samra, Excellence. J’ai des nouvelles très graves à vous communiquer. Je dois vous parler d’urgence.
– Je connais ces nouvelles, Samra. L’intrus arpente le secteur de direction de la Tour, notre secteur ! J’ai envoyé deux de mes cinq escadrons d’élite à sa recherche. Là où Zortac et ses soldats ordinaires ont échoué, eux réussiront. Ils sont triés pour leur compétence et pour leur dévouement à ma personne.
– Vous pouvez également compter sur mon dévouement le plus total, Excellence. C’est pourquoi je vous appelle. Je possède des informations très inquiétantes et j’aimerais vous les apprendre de vive voix.
Ignorant tout de l’alerte et des escadrons lancés à sa poursuite, Vaaxor emprunta le tube horizontal qui se présenta devant lui. Il pressa quelques touches sans s’apercevoir qu’une paire d’yeux l’avait repéré. De l’endroit où il se trouvait, le garde noir n’avait vu qu’un bras et une main dépassant de l’ouverture… et cette absence de reflets bleus qui signait automatiquement l’intrus.
Vaaxor se retrouva dans un secteur où le tapis vert sentait le moisi.
Personne ne devait venir par ici. La couche de poussière ne montrait aucune empreinte de pieds. Par endroits, des murs s’incurvaient comme s’ils allaient éclater. Plus il avançait et plus des saletés jonchaient le sol avant de faire place à de véritables débris détachés des cloisons.
Il poussa une porte. Elle était lourde et ne s’ouvrit pas facilement. Il en comprit la raison en voyant la masse de fils et de matières diverses qui l’encombraient.
Contrairement au reste de la Tour, ici, aucune lumière n’éclairait la salle ou plus exactement ce qui fut une salle. Dans la clarté en provenance du couloir, il remarqua un enchevêtrement de poutres, de blocs de ciment et de meubles emmêlés. Il gravit le monticule.
Quelque chose d’effrayant s’était produit en ces lieux, un sinistre qui avait résulté en l’écroulement du plafond sur une vaste longueur.
Ses yeux tentèrent de mesurer l’endroit, sans succès. La nuit enveloppait toute la zone à l’exception de l’espace autour de la porte.
Son regard se fixa soudain sur une forme reconnaissable dans la brume la plus opaque : un homme !
Il gisait là, immobile.
Vaaxor se porta en avant. Le corps du malheureux était sec, pareil à un parchemin abandonné trop longtemps au feu du soleil. D’autres corps… plus loin, secs eux aussi, totalement. La main de Vaaxor se crispa sur le manche de sa hache. Il ne connaissait qu’un seul type d’animal capable d’infliger une telle mort. Il fallait sortir d’ici, au plus vite !
Un torrent de lumière perça les ténèbres et lui éblouit la vue.
Une voix rauque, autoritaire, tonna soudainement.
– Ne bougez plus ! Nous sommes les troupes d’élite du Dictor. Nous sommes chargés de vous mener près de lui. Restez tranquille, nous voulons juste vous conduire auprès de lui !
Le faisceau éclatant lui brûlait les rétines. À travers le filtre de ses doigts qui protégeaient médiocrement ses yeux, il aperçut brièvement l’homme qui portait cet appareil projetant du soleil. Il n’était pas seul, une vingtaine de ses compagnons commençait à se ranger autour de lui en un cercle distant. D’autres entraient toujours.
La voix autoritaire résonna de nouveau.
– Pas un geste surtout ! Rendez-vous, il ne vous sera fait aucun mal.
Vaaxor n’eut le temps ni de répondre ni d’agir. Un déluge s’abattit soudain sur les hommes.
– Des chachiuas ! hurla Vaaxor.
Un nom, un seul, qui éveilla l’horreur dans le cœur des gardes noirs.
Ces vampires, il leur était déjà arrivé d’en faucher et d’en anéantir un ou deux réfugiés dans un appartement déserté et effondré de la Tour. Mais ce qui leur tombait dessus était une véritable folie : une centaine, peut-être plus, de ces chauves-souris géantes assoiffées de sang !
Les sabres se dressèrent et taillèrent les corps de cuir dur. Les serres répondaient aux lames, les becs claquaient. Deux lasers entrèrent en action. Leurs traits grillaient les créatures en plein vol. Parfois, ils manquaient leur cible et finissaient leur course vingt mètres plus haut dans un plafond déjà instable.
La hache de Vaaxor frappait dans tous les sens.
C’est alors qu’un rugissement déchira le tumulte des ailes et des cris. Un fauve énorme jaillit d’un monceau de débris. Il sortait d’un conduit en partie bouché par les décombres. Ses yeux jaunes ne virent que sa proie au sommet d’un monticule.
Vaaxor n’attendit pas son arrivée. Tout en repoussant un vampire d’un revers de sa hache, il décocha un grand coup de pied dans le monticule. Un monceau de poussières et de débris cascada le long de la pente et aveugla le Xac qui continua obstinément son escalade.
Le jeune homme sauta en arrière à la recherche d’une tige pointue susceptible de servir de lance – la seule arme rapprochée efficace contre un Xac en furie du fait de la longueur des pattes. Il en repéra une à l’entrée.
Il fondit vers elle. Des serres lui agrippèrent les épaules. Précédant le coup de bec fatal sur sa nuque, il frappa férocement la tête dénudée du vampire. L’étreinte se relâcha aussitôt.
Il saisit enfin la tige de métal et se retourna d’un bond.
Un tableau d’enfer se déroulait sous ses yeux. Des hommes, sabre en main, hachaient des vampires monstrueux. Bon nombre jonchaient les décombres, mais certains des gardes ne bougeaient plus eux aussi. Des éclairs de feu explosaient de tous côtés tandis qu’un fauve gigantesque se propulsait vers lui.
En moins d’une seconde, cet univers bascula.
Une immense chape de béton s’effondra dans un vacarme effroyable. Près de la porte, Vaaxor ne fut pas touché par les énormes blocs mais de peu. Il bondit dans le couloir alors que des craquements sinistres montaient du sol. Les murs autour de lui se fendaient.
Il se rua droit devant, la peur au ventre. Une deuxième déflagration s’éleva dans son dos. Après le plafond, le plancher s’était écroulé à son tour.
Il prit un couloir à sa gauche et se retrouva, soulagé, à l’entrée d’un tube encadré de vert. Ses doigts pressèrent des carrés lumineux puis le jaune et il fut emporté loin du chaos.
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